David Lazzari

Entre composition, mix et matière sonore :

        Ce travail s’inscrit dans le cadre de la musique électronique diffusée : des morceaux pensés pour être joués en club, bar ou soirées dansantes, en début ou fin de set, ou même dans des contextes plus calmes comme des ambiances de journée, de film ou d’espace public.

Cette musique repose sur une pulsation répétitive, une évolution progressive et une structure ouverte. Chaque morceau peut servir de base sonore, mixable avec d’autres œuvres, afin de créer une continuité, une atmosphère ou une véritable symphonie de textures. On peut parler ici du principe de Basic Channel, où le morceau évolue selon un code interne, se déconstruit puis repart, laissant le temps au suivant de se fondre parfaitement.

Dans ce milieu, le DJ ne se définit pas par le scratching, comme dans le mouvement hip-hop, mais par l’art de superposer plusieurs morceaux sur une table de mixage multi-pistes stéréo, de les faire évoluer ensemble, créer sa propre boucle vivante et construire un set cohérent en live. Il ne s’agit pas simplement d’une diffusion de A vers B et vice versa, mais d’une écriture continue où chaque élément peut se fondre, se répondre ou s’opposer. C’est ce qui fait la richesse des sets.

Avant l’ère du tout numérique, certains disques vinyles étaient spécialement conçus pour tourner sur une troisième platine, avec des locked grooves , sillon en boucle destiné à créer des boucles infinies. Ces supports permettaient d’ajouter une 3eme texture, une rythmique ou un effet, donnant au DJ la possibilité de composer des sets à la rythmique complexe en constante évolution —  Ref. Vinyl cat: DIP005

Sur cette page de présentation, les morceaux sont composés pour être mixés : d’où des intros et outros longues, rythmiques volontairement simples au départ, éléments espacés pour laisser la place au calage et à la superposition.

Contexte :

Composé et enregistré dans un studio en sous-sol à Genève, en duo avec Dreamwax. Analog Dream plonge dans une atmosphère lente et immersive, entre ambient et lietfield. Le morceau repose sur une basse profonde jouée sur un ARP Avatar, soutenue par des rythmiques analogiques CR-78 et TR-808, et enrichie de textures planantes de guitare classique. Les sons extérieurs – voitures, pluie, réverbération naturelle de la pièce – ont été volontairement intégrés dans l’enregistrement, captés sur bande.
Ce cadre acoustique réel devient partie intégrante du paysage sonore.

Réflexion artistique :

Ce morceau mêle composition et enregistrement dans une approche intuitive. Le développement lent installe une atmosphère calme où le son et le silence se répondent. L’usage d’instruments analogiques et de sons réels crée un lien direct entre le studio et le monde extérieur. Plus qu’une recherche, c’est une manière de laisser la musique respirer et de retrouver le plaisir du son. Oppressant au départ, le morceau évolue doucement vers une mélodie plus lumineuse et apaisée.

Contexte :

Letter for you s’inspire des ambiances estivales — plages, bars, espaces ouverts — où la musique devient un lien social autant qu’un plaisir d’écoute.

Elle est souvent jouée en warm-up de soirée, ou même comme thème principal lors de certaines soirées plus deep, où l’ambiance et le groove priment sur la performance.

Réflexion artistique :

Ma démarche s’appuie sur un style deep house romantique: une façon de travailler le son et de le sculpter jusqu’à ce qu’il prenne vie.
Les basses sont pensées pour la diffusion en club, tandis que l’équilibre du spectre permet aussi une écoute douce, presque méditative, en dehors du contexte dansant.

C’est une approche du son plus personnelle qui cherche à relier deux mondes — celui de la musique de club et celui de l’écoute quotidienne — pour offrir une expérience sonore à la fois fluide, simple, sans prise de tête et légère. 

Ce style est progressivement devenu le fil conducteur du label DIP Recordings, orienté vers la deep house et les sons profonds, à la fois club et introspectifs.

Contexte :

Emphatic est un morceau construit autour d’un rythme minimaliste et continu, où le kick de la boîte à rythmes domine tout l’espace, tandis que des effets planantes créent une atmosphère tragique.
Pensé pour des systèmes de diffusion puissants (Turbosound, bass rigs).
Ici, le son est abordé comme un phénomène physique.

C’est le portrait d’une scène techno devenue légèrement élitiste, où la technique et la puissance sonore ont pris le dessus. J’ai voulu traduire cette ambiance de clubs démesurés, souvent à haut plafond, équipés de systèmes son massifs.

Réflexion artistique :

À travers ce rythme primitif et tragique, je représente une vision du son devenue presque élitiste, réduite à sa puissance et à l’énergie brute. Cette approche repose sur du matériel technologique de haut niveau — cher, impressionnant — conçu pour être diffusé dans de grands espaces.
Dans certains contextes, la culture du son a pris une dimension quasi dogmatique, transformant la musique en une simple démonstration acoustique accompagnée d’effets de lumière : des rythmes sans mélodie pendant des heures. Cette esthétique de pressions sonores érigé comme modèle, exclue ceux qui sont sensibles aux mélodies. 

Dans ce snobisme sonore, où la scène est entretenue par des milieux privilégiés dans leurs lieux, le son est devenu un culte réservé à quelques initiés capables de s’offrir de grandes scènes. Ils se vantent de « sculpter » les résonances architecturales du lieu à coups de mini-égalisation sur leur table de mixage pendant leur set.
 
Sur cette piste, je cherche à montrer une autre facette de la musique électronique techno.